Loire à pieds : étape 2, le canal de la Martinière, métronomie arborée
- Didier Guénin
- 11 avr. 2022
- 2 min de lecture

Le programme de la journée porte un seul nom, le canal de la Martinière.
Enjambant le ruisseau du Migron, j’empruntais des chemins par la Sauvageais et la Moinerie. En quelques kilomètres à peine mes courbatures s’étaient évaporées, disloquées au rythme des pas. Mon corps exprimait une appétence à reprendre sa marche. Je filais à travers champs, trois mulets débonnaires me suivirent du regard. Les foins avaient été faits, et des centaines de rouleaux de pailles décoraient la campagne. Un ragondin se jeta dans les eaux d’un fossé d’irrigation à mon passage. Le système hydraulique se révélait particulièrement développé aux abords du canal dont les quinze kilomètres de long furent réalisés à la fin du XIXe siècle, contournant l’estuaire par le sud entre Frossay et Le Pellerin, pour permettre la navigation jusqu’à Nantes des grands voiliers qui se heurtaient aux bancs de sables particulièrement mouvants dans cette partie terminale de la Loire.
Le canal de la Martinière ouvrait le fond de l’estuaire à la navigation et évitait le recours compliqué au transbordement de la marchandise depuis Paimboeuf par une noria de gabares. Mais très vite la mécanisation de la navigation avec l’émergence des navires à vapeur, et plus particulièrement des dragues à vapeur, permit de maintenir un chenal suffisant dans l’estuaire. Ainsi le canal connut une histoire bien plus courte que son cousin le canal de Suez qui lui avait pourtant fourni une partie de ses matériaux de construction. Le canal de la Martinière appartient aujourd’hui à l'Union des marais, qui gère l'hydrosystème du Pays-de-Retz. C’est un lieu superbe et paisible de promenade, de pêche, et de pique-nique en famille. S’allonger au pied de l’un des magnifiques arbres qui le bordent est un plaisir auquel je ne résistai pas, vérifiant combien un sac à dos est le compagnon multi-usage du randonneur, tour à tour : indispensable contenant de ses équipements, gardien de son autonomie, oreiller moelleux ou dossier confortable.
Comme hier avec les carrelets, l’alignement quasi parfait des arbres et les longues perspectives rectilignes dessinent un parcours immobile. J’avance, je ressens le choc amorti de mes pas sur l’herbe fauchée des berges. Plus j’avance, plus le paysage se régénère. Seuls les pêcheurs changent de tenue, deux sont nue tête, un porte une casquette, un autre un bob. Cette répétition m’installe hors du temps, dans une métronomie hypnotique ; je suis happé par mon propre pas, hypnotisé par le balancement de mon corps. La sensation est agréable, enveloppante. Je suis dans une bulle, celle de ma marche.
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